Je voulais faire un post sur les films de mon enfance/adolescence qui me rassurent dans la vie de tous les jours. J'ai écris ça à la place :
Normalement, je ne parle pas de ça. A vrai dire, j’ai toujours survolé la politique de manière complètement superficielle. Je sais de quoi on parle, je ne suis pas idiot. Je sais vers quel bord je penche, parce que je viens d’une classe sociale qu’on appelle vulgairement ou non, la classe ouvrière. Mon père est maçon, ma mère est aide-soignante. J’ai grandi dans une petite ville du fin fond de la Charente, contenant environ 3000 habitants. Une ville clichée, sans vouloir être méprisant. Une ville ou les classes sociales ne se mélangent pas. J’ai eu beaucoup de temps au collège et au lycée pour pouvoir observer ça, puisque personne (ou presque, Sophie, je sais que tu lis ça, je t’aime) ne souhaiter « traîner » avec moi. Ils sentaient déjà la différence. On me tapait dessus à l’abribus, on me crachait dessus, m’insultait, j’en passe et des meilleures. Une ville qui a peur de l’inconnu parce que la seule fenêtre qu’elle a de l’extérieur, c’est TF1. Et que nous savons très bien, que pour TF1, le mal, c’est les arabes qui vivent en cité et les pédés. (Je vulgarise, mais on est proches de ça, cf. la guerre actuelle entre les habitants de la commune et les gens du voyage sédentarisés un peu à l’extérieur).
A 18 ans, bac et permis en poche, j’ai couru loin de la ville. J’ai perdu vingt kilos, pris d’innombrables drogues, avalé des hectolitres d’alcool, parce que je ne voulais pas que ces « gens-là » aient raison. Non, je n’étais pas une « pédale », « tapette », « tantouze », et autres « pédé ». Puis j’ai rencontré des gens qui m’ont fait comprendre que ce n’était pas une maladie. Non. Que c’était comme ça, et que je n’y pouvais rien. J’ai commencé à accepter. C’est long, hein, et douloureux d’accepter la chose. Il faut embrasser le monstre qui sommeille en soi. C’est qu’on m’avait appris, enfant. Que si j’étais pédé, j’étais immoral, et presque une personne dangereuse pour les autres. Un danger. Mon premier amoureux est arrivé sur son cheval blanc. Je me suis laissé emporter, et pendant 2 ans, j’ai appris. Je ne vivais pas caché, mais j’apprenais à ne pas m’exposer en public. Pas par peur, non, mais parce que je suis pudique. Je n’aime pas laisser exploser mes sentiments. Je ne l’ai jamais fait. Puisque tout au long de ma vie, j’ai appris à me contenir, ne jamais montrer le vrai « moi ». Je masque et cache. Nous savons que l’homophobie est là. Comme le racisme. C’est comme ça. Je suis et resterai pour toujours, quelque chose qui vous dépasse. Et j’en arrive là où je voulais en venir.
Toi Frigide, Christine, et tous vos petits copains. C’est pour vous. Quand j’ai entendu parler d’une loi pour le mariage gay, l’adoption, etc... J’étais content. Pas parce je rêve d’un GRAND mariage, mais parce que c’est un pas de plus dans l’acceptation de ce que je suis. Je ne suis pas malade mental, non, je suis une personne comme tout le monde. Et puis vous êtes arrivés, chevauchant vos plus belles croix du Christ, pour dire que c’était immoral. Que ça rompait les filiations, etc. Quand je vous écoute donner votre opinion, je ne vous entends pas. Non. Pour moi ce qui sort de votre bouche, c’est : « Les pédés et les gouines devraient disparaitre ». Voilà ce que j’entends. Je comprends qu’on refuse des projets de lois, qu’on soit contre. Mais je ne comprends pas pourquoi un tel refus. Qu’est-ce que cela peut vous faire que je puisse me marier ? Vraiment ? Je ne vous inviterai pas de toute façon. Puisque tous mes proches m’aiment, peu importe ce que je suis. J’ai commencé à devenir vraiment inquiet depuis ce weekend, quand vous, ma chère Frigide, avait appelé au sang. Là, mon ventre s’est tordu, et une boule s’est nouée dans ma gorge. On en est donc là. A un nazisme des temps modernes. Tuons les gays ? C’est ça ? Tu sais Frigide et vous ces copains (je vais vous dire « tu », hein, parce que vous vous permettez de me juger sans me connaitre), parfois, il faut faire attention. Parce que, quelque part, en France y a des enfants qui grandissent. Et qui évoluent avec les mêmes horreurs que j’ai traversé, petit. C’est dur de s’accepter, encore plus quand on nous tape sur la gueule. Et que si je dois voir un psy pour régler mes problèmes affectifs, c’est à cause de toi. Parce que moi, tout ce que je veux, c’est aimer et être aimer. Et pouvoir le faire sans qu’on me dise que c’est mal. J’ai déjà vécu ça avant, et mes traumatismes d’enfant/adolescent/jeune adulte, reviennent force 10 en ce moment.
Tu me dis que tu n’es pas homophobe. Pour moi, tu l’es. Tu dis que Jésus ne l’accepte pas. Moi, ce que j’ai appris au catéchisme, c’est que Dieu nous aime tous, peu importe ce que nous sommes. Je ne crois pas en Dieu, parce que s’il existait, il m’aurait laissé cocher la case hétéro avant que je naisse. Ça m’aurait évité ce genre de tracas. Je baisse la tête dans la rue en ce moment Frigide. Et c’est à cause toi.
Mais ce que j’ai appris en grandissant de cette manière, c’est que finalement, j’aime tout le monde. Et tu auras beau manifester, me huer, me haïr même, moi, je continuerai de t’aimer. C’est la seule manière que j’ai pour te prouver à quel point la stupidité peut être une tare aussi. Je continuerai de briller, parce que j’ai réussi à me construire malgré la haine que je produisais autour de moi. Je suis fier de ce que je suis devenu. Tu auras beau te battre pour que je n’ai pas de droits, je vivrais toujours normalement autour de toi. Parce que je suis comme toi. Un être humain avec des sentiments et du ressenti.
Tu auras beau essayer de m’écraser, je ne ferai que sourire.
Tu es juste ignorante Frigide. Et vous les gens à ces côtés, vous ne savez pas à quel point vous me faites mal. J’encaisserai parce que je l’ai fait toute ma vie, et que j’ai toujours été détesté parce que je suis pédé.
J’ai appris à être plus fort que tout ça.
Je vous aime.